Les médications precrites pour le TDAH ont-elles des effets dépresseurs?
Les médications prescrites pour le TDAH ont-elles des effets dépresseurs ?
Notre enfant a une difficulté de l’attention avec hyperactivité. Nous ne comprenons pas ce qu’implique cette difficulté et nous acceptons mal la situation. Notre enfant n’a jamais aimé l’École et nous pensons qu’il faut s’y résigner. Les résultats de sa première année ont été catastrophiques. Le pédiatre a attendu le rapport de l’évaluation psychologique avant d’accepter, avec hésitations, de prescrire la dose minimale d’une médication. La décision de passer en deuxième année était périlleuse… alors Nous avons accepté un peu à regret La médication. Les effets ont été bénéfiques sur l’hyperactivité et sur l’impulsivité de notre enfant. Son rapport aux autres s’en trouve grandement amélioré. Cependant, l’École nous dit que bien que l’attention se soit améliorée, la difficulté demeure encore présente. Notre enfant ne tiendrait pas suffisamment l’attention pour comprendre les notions enseignées et qu’à ce rythme, il ne pourra parvenir à rattraper les lacunes dans ses apprentissages. Nous avons décidé d’attendre pour ajuster la dose de médication, car nous avons lu que les médications ont des effets secondaires de dépression. En plus, récemment nous avons lu une nouvelle dans le journal à propos du suicide d’un enfant de cinquième année. Un cauchemar.
RÉPONSE :
D’entrée de jeu, je vous dirai qu’il y a peu de ‘’toujours’’ et de ‘’jamais’’ quand on pense ‘’gestuelle mentale’’. Chaque personne a développé des habitudes qui lui sont propres et qui constituent le caractère unique de son profil mental. Il devient difficile pour moi de vous répondre puisque de nombreuses informations me manquent pour me prononcer. Cependant, certaines combinaisons d’habitudes se rencontrent plus fréquemment que d’autres, certaines difficultés se rencontrent aussi plus régulièrement. C’est pourquoi je me permets de vous lancer mes remarques qui, je l’espère, apporteront de l’eau au moulin de votre réflexion.
Il faut bien saisir que ‘porter à son attention’, c’est faire exister dans sa tête les choses et que ce n’est qu’en les portant à mon attention que je pourrai leur trouver du sens. Ainsi, à cause d’une difficulté de l’attention, j’évoque peu ou partiellement les choses. Ces choses trouvent donc peu de sens pour moi : il devient ‘normal’ qu’elles me motivent peu (puisqu’elles n’ont pas de sens). Nous allons à l’école pour apprendre. Si j’apprends mal et que je rencontre des échecs, il devient ‘normal’ que je n’aime pas l’école. Si parce que je suis impulsif, à chaque jour qui s’amène, je vis des conflits et que l’on me ‘dispute’, il est ‘normal’ que je n’aime pas mes journées.
Je saisis que votre enfant était en difficulté à la fois, en lecture, en écriture et en mathématiques, que sa difficulté d’attention atteignait même sa réflexion au point de le rendre impulsif et d’envenimer son rapport aux autres. On peut conclure que sa difficulté d’attention est assez importante. Il n’est pas étonnant qu’une dose minimale ne le supporte pas suffisamment. Les effets bénéfiques obtenus indiquent cependant qu’une médication soutenant l’attention semble une voie qu’il vaut la ’joie’ d’explorer.
Pour tout vous dire… je me demande ce qu’attend votre pédiatre. A-t-il demandé une évaluation de son potentiel intellectuel ou le rapport d’un neuro-psychologue? Bien entendu, on ne peut exiger des résultats si les objectifs ne sont pas réalistes et ne respectent pas le potentiel de l’enfant. Malheureusement, ma crainte est qu’on attende d’autres échecs scolaires? Je vous retourne votre question : ces échecs à répétition ne risquent-ils pas d’avoir des effets ‘dépresseurs’ ? Et dans la situation où votre enfant obtiendrait les seuils de réussite, conclura-t-on que la dose est suffisante ? Évidemment, on devrait aspirer à ce qu’il actualise son potentiel et que les résultats soient à la mesure de ses capacités.
J’observe effectivement, parfois, que la prise de médication pour soutenir l’attention de l’enfant impulsif peut le rendre plus ‘sensible’. Il ‘porte plus attention’ à certains éléments de la réalité qui auparavant lui échappaient. Comme il n’a pas l’habitude de se ‘rendre compte’ de ces ‘informations encore moins, de les ‘soupeser’, il peut se sentir touché ‘outre-mesure’. Chemin faisant, il s’exercera et ‘s’habituera’. Il saura mieux discerner ce qui est ‘courant’ de ce qui est ‘important’. Je me sens attristée par une situation qui auparavant m’échappait, mais avec l’expérience, je saurai qu’il n’y a pas de quoi pleurer toutes les larmes de mon corps pour ce qui, tout compte fait, se présente relativement souvent… qui n’est pas ‘dramatique’.
De fait, je ne suis pas médecin ni pharmacienne ; mais je sais que plusieurs résultats de recherche sont faussés, car on omet de prendre en compte la complexité et les finesses d’une situation. Je sais aussi que l’on peut interpréter des données de recherche pour leur faire dire ce qu’on veut bien y lire. Je serais mal venue de me poser à l’encontre de ce que votre pédiatre vous recommande, d’autant plus que j’ignore quel est le potentiel intellectuel de votre enfant. Cependant, quand un enfant a un potentiel dans la bonne moyenne et que malgré la récupération et le temps supplémentaire investi, il rencontre échecs par-dessus échecs, il peut déprimer et se démotiver. Je mets des efforts et du temps, rien ne s’améliore. C’est compréhensible, forts sont ceux qui ne le sont pas en de pareille situation. Dans un entourage ne sachant ajuster ses attentes et ses exigences au potentiel qu’il est en mesure d’actualiser, l’enfant pourrait rencontrer la dépression. Une fragilité émotionnelle, un milieu démuni de capacité auto-critique, un trouble psychologique, certains enfants peuvent en venir à penser au suicide.
Je pense à cette maman. Elle travaille dans le milieu de l’éducation et elle très consciente de la difficulté d’attention de son fils. Conséquente avec sa décision, elle a préféré réduire ses attentes quant aux performances scolaires et elle a choisi que son fils apprenne à vivre avec cette ‘difficulté’. N’y a-t-il pas des Annie Brocoli, des Jacques Martin et des Einstein qui ont fait leur bonhomme de chemin malgré de piètres résultats scolaires ? Maintenant, son fils a 16 ans et il veut apprendre à conduire une voiture. Elle s’est assise du côté passager pour lui enseigner quelques rudiments. En sortant de la voiture, il a laissé les clés sur l’ignition et barré la porte. ‘’C’est clair que jamais je ne lui prêterai la voiture !’’ Maintenant, imaginez que devenu adulte, il décide ‘malgré tout’ de conduire… Qu’à cause d’une distraction, il a un accident… Qui lui coûte la vie…
Comme parent, il peut être difficile d’accepter un diagnostic et d’aller vers une médication quand on ne saisit pas les répercussions d’une difficulté de l’attention sur les autres actions mentales. Pourtant, s’il s’était agi du diabète… On préfère que notre enfant ne soit pas diabétique, mais heureux qu’une médication existe pour contrecarrer la maladie. L’ajustement de la dose d’insuline ne pose pas de remords de conscience… Est-ce que je me trompe ? Bien sûr que non.
Pour conclure, je répondrai ainsi à votre question. Comme la difficulté d’attention de votre enfant a été diagnostiquée à la lumière d’examens psychologiques… Mieux vaut prescrire jeune une médication adaptée et optimale pour remédier aux effets de la difficulté d’attention sur la compréhension et la réflexion que de soumettre votre enfant à des échecs scolaires et à des difficultés dans ses rapports aux autres. Échecs qui pourraient aller jusqu’à remettre en question sa propre valeur et à perdre l’estime de soi.’’ Oui, dans certains cas, de tels échecs ont pu mener au suicide. Je tends même à penser qu’une part des adultes qui prennent actuellement des antidépresseurs et des anti-anxiolytiques ont été soumis leur vie durant aux impacts d’une difficulté d’attention assez importante non diagnostiquée. La gestuelle mentale permet de considérer l’attention comme un geste mental. Peu importe votre décision, votre enfant gagnera à pratiquer régulièrement des loisirs qui lui permettront d’exercer cette action mentale. Il importera surtout que vous soyez clairs, vous l’aimez et il est ‘bon’, peu importe ses résultats scolaires.
Bonne réflexion.